Un petit post « scientifique » pour répondre à quelques questions sur les rhums arrangés, plus particulièrement sur les suspendus. J’ai souvent vu des gens se demander pourquoi le faire, et si c’était grave ou pas de l’ouvrir en cours…. Réponses !
Pourquoi faire un rhum arrangé suspendu ?
Pour répondre à cette première question, il faut d’abord savoir que tous les liquides ont une couche plus ou moins grosse de vapeur à leur surface. C’est pour cette raison que l’alcool sent l’alcool: il y a toujours de l’alcool qui s’évapore, doucement, et donc on peut le sentir (pas besoin de plonger son nez dans le liquide pour le sentir… même si ça peut arriver après quelques verres de trop). C’est pour cette raison que de l’eau à l’air libre (genre une flaque d’eau) finit par disparaitre: pourtant, on ne la fait pas bouillir : on dit que le liquide s’évapore.
Sans rentrer dans les détails, la nature aime les équilibres en toute chose, donc de l’air qui ne contient pas beaucoup d’eau dedans va « puiser » dans la flaque pour se charger en eau, et être plus proche d’un équilibre avec l’eau elle-même. A l’inverse, de l’air va aussi se dissoudre dans l’eau, pour essayer d’atteindre un équilibre entre les deux.
Alors c’est très bien tout ça, mais dans notre cas ? Et bien c’est pareil, mais dans un récipient fermé : plutôt que de s’évaporer dans l’atmosphère (un énorme réservoir d’air, donc l’équilibre n’est jamais atteint, donc la flaque d’eau disparait entièrement), notre liquide va s’évaporer dans le peu d’air que la bouteille fermée contient (d’où l’importance de l’étanchéité !) : l’air va donc se charger en vapeurs d’eau et d’alcool, jusqu’à atteindre la « pression saturante » : c’est à dire que l’air est chargé au maximum qu’il peut d’eau et d’alcool. A ce moment, commence alors le procédé de condensation : l’air est tellement chargé en eau/alcool qu’il essaie de se décharger de ceux-ci, en formant des gouttes : ce sont celles que l’on voit ruisseler sur le fruit attaché. En retombant le long du fruit, les gouttes vont se charger en composés aromatiques (ce qui donne le goût et l’odeur du fruit/grains plantés dans le fruit), tout doucement, et seulement en surface : donc on aura que des notes de zest par exemple pour un agrume.
Comment faire un rhum arrangé suspendu ?
Il faut un récipient bien hermétique et assez grand (haut et large) pour pouvoir placer vos fruits (agrumes, ananas…) en suspension au dessus du rhum sans que ceux-ci ne trempent dedans.
Il faut aussi prévoir un système de fixation pour les fruits en suspension :
- Ficelle alimentaire que l’ont fait passer autour du fruits puis que l’on fixe grâce au couvercle du bocal (en la coinçant ou en la fixant sur l’attache…).
- Si bouchon/couvercle en liège, on peut fixer un crochet dessous pour ensuite nouer la ficelle dessus.
- Certains utilisent des pics en bois pour en faire un trépied pour le fruit mais je ne conseille pas : vous allez devoir percer votre fruits (pas trop conseillé pour les agrumes) et le bois va forcément donner un gout en trempant dans votre rhum…
Une fois votre système de fixation trouvé, ajouter le rhum au fond du bocal, à ce moment la vous pouvez sucrer un peu mais ce n’est pas obligatoire (on peut sucrer sur la fin ou directement dans le verre). Puis fixer votre fruit en suspension au dessus du rhum, ajuster le niveau du rhum mais bien laisser une marge d’1 cm au moins avec votre fruit. Et fermer bien hermétiquement votre bocal… Puis il faut être patient et essayer de ne plus l’ouvrir pendant un bon moment pour que l’auto-distillation se lance.
Peut-on ouvrir le bocal en cours de macération ?
En soit, ce n’est pas très grave de l’ouvrir : les gouttes chargées de composés aromatiques sont déjà retombées dans le rhum liquide, donc on ne perd rien qui a déjà été fait. Par contre, on va mettre l’air de la bouteille en équilibre avec l’atmosphère, donc on va perdre tout le rhum qui était dans l’air de la bouteille. Il faudra donc 1 jour environ pour qu’une fois refermée, la bouteille se remette à l’équilibre et que les gouttes de condensation réapparaissent.
Quelle est la température parfaite pour un rhum suspendu ?
Comme pour le rhum arrangé ‘immergé’, la température va accélérer la macération (ici la diffusion de particules aromatiques dans des gouttes/du liquide, et aussi le cycle d’évaporation/condensation va accélérer). Donc plus c’est chaud, plus c’est rapide, mais attention à une certaine température on dégrade les composés aromatiques qui perdent leur goût (pensez au basilic, qui perd tout son goût à la cuisson !), il y a donc un juste milieu à trouver…
Comme ça (mais pas sûr de moi du tout) je pense que 30-35° c’est un bon compromis. Personnellement je m’ennuie pas et je laisse à température ambiante, mais chacun sa méthode, la science ne doit pas enlever le plaisir de bidouiller ses techniques !
Conclusion
Suspendre, c’est:
- Esthétique
- Amusant
- Permet une extraction lente et en surface : pas de risque d’introduire de l’amertume dans le rhum avec les agrumes
- L’ouvrir n’est pas dramatique, mais il faut essayer de ne pas trop le faire, sous peine de perdre pas mal de temps de macération
Recettes de rhums arrangés suspendus
Voila toutes nos recettes de rhums arrangés suspendus
Merci à Clément Sabatier Pouget pour les infos et son texte ainsi qu’à Alchimie !
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